ETUDE ALIENOR

(Antioxydants, Lipides Essentiels, Nutrition et maladies OculaiRes)

Les maladies oculaires liées à l’âge

Les maladies oculaires liées à l’âge sont actuellement les principales causes de cécité et de malvoyance au niveau mondial. Il s’agit de maladies dégénératives, touchant principalement les personnes âgées, et affectant les différentes parties de l’oeil : la rétine (dégénérescence maculaire liée à l’âge ou DMLA), le nerf optique (glaucome) et le cristallin (cataracte).

La DMLA est une dégénérescence du centre visuel de la rétine, appelé macula. Il en existe deux formes : la DMLA néovasculaire (ou humide) et la DMLA atrophique (ou sèche). Dans les formes sévères de cette maladie, la vision centrale, qui permet de lire et de reconnaître les visages, est perdue. En France, plus de 600 000 personnes sont atteintes de DMLA. Depuis 2007, il existe des traitements injectables dans l’œil, qui permettent de freinerl’évolution de la DMLA néovasculaire.
Une autre maladie oculaire fréquente est la cataracte. Il s’agit d’une opacification du cristallin, lentille réglable qui focalise la lumière sur la rétine. Le seul traitement disponible est l’extraction du cristallin et son remplacement par un implant artificiel. L’extraction du cristallin est actuellement l’acte chirurgical le plus fréquent en France, avec environ 700 000 opérations par an.
Enfin, le glaucome est une maladie du nerf optique, qui transporte les signaux visuels vers le cerveau. Il entraîne une perte progressive du champ visuel périphérique et aboutit ainsi à une vision « en tunnel » et même à la cécité. Il existe très peu de données épidémiologiques sur le glaucome en France.

L’étiologie de ces pathologies est multifactorielle, impliquant des facteurs non modifiables comme l’âge, le sexe et les facteurs génétiques et des facteurs modifiables comme le tabagisme, l’exposition aux ultra-violets, la pression intra-oculaire et la nutrition.
Les études épidémiologiques réalisées ces vingt dernières années, dont en France, l’étude POLA, ont permis de préciser certains facteurs de risque des maladies oculaires liées à l’âge (DMLA, cataracte, glaucome). Plusieurs facteurs modifiables ont été mis en évidence, tels que le tabagisme (pour la DMLA et la cataracte), l’exposition aux ultraviolets (pour la cataracte) et la pression intra-oculaire (pour le glaucome). Depuis quelques années, les recherches portent également sur l’identification de facteurs nutritionnels permettant de prévenir ou de retarder l’évolution de ces maladies.

C’est pourquoi, nous menons depuis 2006 l’étude ALIENOR (Antioxydants, Lipides Essentiels, Nutrition et maladies OculaiRes), dont l’objectif est d’étudier les associations entre les maladies oculaires liées à l’âge (DMLA, glaucome, cataracte, sécheresse oculaire) et les facteurs nutritionnels, principalement les acides gras oméga-3, les caroténoïdes (lutéine et zéaxanthine) et les antioxydants (vitamines E et C, oligo-éléments)). Sont également étudiés, les autres déterminants majeurs de ces maladies : facteurs génétiques, facteurs environnementaux (notamment exposition au soleil), facteurs vasculaires ainsi que la caractérisation du recours aux soins ophtalmologiques dans la population âgée.

Cette recherche est menée grâce à une étroite collaboration entre le Centre INSERM U1219- Bordeaux Population Health Research Center (C. Delcourt, J.F. Dartigues) et le service d’ophtalmologie du CHU de Bordeaux (J.F. Korobelnik, M.N. Delyfer, M.B. Rougier, C. Schweitzer).

L’étude Alienor en bref

L’étude ALIENOR est une cohorte épidémiologique en population générale âgée. Elle s’appuie sur une cohorte existante l’étude des 3 Cités (3C), dont l’objectif initial est l’étude des facteurs vasculaires de la démence. L’étude 3C a inclus 9 294 personnes de plus de 65 ans dans 3 villes françaises (Bordeaux, Dijon et Montpellier), dont 2 104 à Bordeaux. Les sujets ont été recrutés, en 1999-2001, à partir des listes électorales et sont suivis depuis, environ tous les 2 ans (Voir la figure de chronologie). Les données recueillies à chaque suivi incluent des évaluations cognitives, des examens IRM, des incapacités et modifications comportementales, ainsi que de nombreux paramètres vasculaires (antécédents de maladies cardiovasculaires, mesure de la tension artérielle, électrocardiogramme, échographie des carotides). A l’inclusion, un bilan sanguin (lipides, glycémie, créatinine) et une banque d’ADN ont été recueillis. De plus, pour la cohorte de bordelaise, des données nutritionnelles détaillées ont été recueillies : dosages de nutriments d’intérêt dans la sérothèque (antioxydants, acides gras oméga-3, caroténoïdes) et enquêtes alimentaires détaillées (rappel des 24 heures, questionnaire de fréquence) réalisées lors du premier examen de suivi (2001-2002).

Examens ophtalmologiques réalisés

L’étude ALIENOR consiste en des examens ophtalmologiques, qui sont proposés à tous les participants de la cohorte 3C bordelaise depuis le troisième examen de suivi (2006-2008) (Voir la figure de chronologie). Parmi les 1 450 sujets ayant participé au troisième examen de suivi de la cohorte bordelaise, 963 ont initialement accepté de participer à la cohorte ALIENOR. Depuis, on totalise plus de 1000 sujets ayant participé au moins une fois à l’étude Alienor. Ces examens consistent pour chaque œil : à l’enregistrement des antécédents ophtalmologiques, des mesures de la réfraction et de l’acuité visuelle, deux photographies couleur de la rétine à 45° (macula, nerf optique), une mesure de la pression intraoculaire et de l’épaisseur cornéenne centrale, un test du break-up time. Egalement, un auto-questionnaire sur les facteurs de risque oculaires (exposition au soleil, utilisation de la télévision et de l’ordinateur) et les symptômes de sécheresse oculaire (index Ocular Surface disease Index (OSDI)) est recueilli. Uniquement en 2008-2009, une étude ancillaire sur le pigment maculaire a été réalisée auprès de 395 sujets.

Depuis 2009, des investigations oculaires novatrices ont été rajoutées aux examens ophtalmologiques : l’examen en tomographie à cohérence optique de haute résolution et en autofluorescence (OCT Spectralis, Heidelberg, Allemagne), de l’imagerie rétinienne à grand champ (Optomap, Optos, Dunfermline, Royaume Uni) et des propriétés biomécaniques de la cornée (Ocular Response Analyzer, Reichert, Depew, Etats-Unis).

Grâce à ces différents examens ophtalmologiques, le diagnostic des principales maladies oculaires (DMLA, glaucome, cataracte) a été posé, selon les classifications internationales. Egalement, des associations de ces maladies avec le statut nutritionnel, les facteurs génétiques et vasculaires ont été mises en évidence et d’autres sont actuellement recherchées